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En Votre Compagnie                                       

Traduction de la critique du quotidien national finlandais
le
Helsingin Sanomat

 


VISA, beau spectacle à Nukketeatteri Sampo, montre ce qui donne la force aux réfugiés de continuer. Le spectacle du Cirque des Puces et d' En Votre Compagnie touche jusqu’à la moelle des os.

Qu'est ce qui donne la force aux réfugiés de continuer ? L’espoir. Sans espoir l’homme est mort même si son corps reste vivant. Cette exploration franco-finlandaise ne pourrait pas être plus actuelle. Le spectacle essaye de capter la synthèse du lugubre et de l’espoir, sans utiliser de parole, comme l'indique le sous-titre. Effectivement, un réfugié se retrouve souvent aussi sans mot, sans langue.

Il faut avouer que moi-même, en tant que spectateur, j’avais besoin de paroles. Sans le texte du programme, mon interprétation aurait pu prendre n’importe quel chemin. Avec les quelques lignes de présentation, l’histoire s’est envolée et s’est développée dans mon esprit de spectateur, me laissant les mains libres à chercher des significations. Le coté symbolique appelait nos interprétations.

Dans les images des actualités à la télévision, nous voyons des gens désespérés, dans les bateaux bondés en train de couler. Beaucoup sont noyés. Ceux qui sont sauvés sentent qu’on ne veut pas d'eux, comme s'ils étaient des fardeaux.


Les images des actualités nous culpabilisent, mais finalement on se retrouve engourdis. Le Cirque des Puces et En Votre Compagnie réveillent le spectateur en lui proposant de revoir cette profusion d'images d'actualités quotidiennes. Ils ramènent l’exil à un niveau individuel avec seulement trois interprètes, de façon stylisé et avec très peu d’éléments. Le spectacle ne profite pas du sanglot et de l’horreur mais porte un regard incisif dans l’esprit d’une personne qui cherche l'équilibre face à des frontières aussi bien physiques que mentales.

VISA combine la danse, la marionnette et le cirque en une totalité, où les origines des disciplines se brouillent et forment une nouvelle forme d’interprétation. On ne voit pas des poupées ”Kasper”, mais des branches et du plastique déchiré. Une main invisible monte et descend des barres qui forment des frontières ou même des murs sur le chemin du réfugié.

Des branches mortes sont entassées sur une personne, comme si quelqu’un, qui regarderait d’en haut, voulait voir combien de charge cette personne peut supporter. Sur scène cela se réalise concrètement mais le même poids pèse encore pire dans l’esprit.

Le camp de réfugiés est une planche de salut en même temps qu'une prison. Dans le spectacle la tempête et la catastrophe se répètent sous différentes formes. Le plastique noir couvre la terre blanche comme une flaque d’huile en mer, tuant tout être vivant. Les personnages construisent une tente avec des déchets de plastique et des branches de bambou, une sorte d’abris, quelque chose qui ressemble à une maison. Même elle se fait aussi déchirer par la tempête.

La matière plastique blanche se transforme en fouet froid et menaçant, comme le mépris, la dévalorisation ou l’indifférence cruelle des autres, si injuste pour les victimes Un vent froid frappe jusqu’à la moelle des os et il atteint aussi le public. Mais l’espoir vit quelque part. Même dans ce spectacle la neige peut se transformer en ami et camarade de jeu, au moins dans notre imaginaire. Il y a aussi de l’espoir dans la musique de Tomas Takolander. Le son de sa musique au gamelan caresse avec douceur.

Une solution n’est pas présentée. Elle semble improbable dans le monde réel aussi.

 

Jussi Tossavainen
8 octobre 2016